Plasticienne, performeuse et costumière, j’aime imaginer des corps habitant un espace. Mon travail se situe entre le réel et la fiction. Durant ces dernières années, les expérimentations formelles que j’ai menées, et leur aboutissement performatif ont tourné autour de ce centre de gravité : l’interaction. La croyance en un art capable de générer des expériences à la fois neuves et communes.
Le socle de ma recherche part toujours d’une dimension documentaire : échanges et rencontres, pour m’immerger dans des milieux dont je suis a priori éloignée (motoclub, club de pétanque…). Sur un temps potentiellement long (1 mois, 6 mois…), je cherche à établir une complicité et à développer une familiarité concrète avec les gens qui constituent ces milieux. Ils m’offrent en retour la possibilité de partager avec eux les espaces, et de les intégrer (avec leur consentement) dans ma production, avec leurs qualités, leurs énergies et leur simple beauté. Et in fine,  en faire émerger une pièce/objet qui est à la fois le produit de ce milieu et une façon d’y intervenir. J’éprouve donc d’abord cette réalité de l’intérieur, puis j’effectue une intervention esthétique pour en restituer ma vision. Cette intervention prend la plupart du temps la forme d’un personnage décalé ou d’objets mûs par des corps. En s’intégrant dans le “milieu”, ces personnages nouveaux venus permettent une observation neuve du paysage.
L’architecture de l’espace est également une composante importante de ma démarche. Les lieux que j’aime éprouver comportent souvent en eux-mêmes, dès le départ, une dimension “scénique” : podium, gradin, vitrine, catwalk, tapis rouge… Ces espaces d’exposition, de révélations deviennent autant de terrains de jeu.
Le format de production est basé sur une autonomie radicale : produire chaque élément du dispositif par moi-même (DIY). Dans cette démarche de réemploi, d’accumulation ou de détournement des matériaux et objets, chaque élément devient essentiel à l’image globale, et respecte cette démarche de “sauvetage et d’épargne” (Marinette Cueco).
Selon la même idée, la plupart de mes projets aboutissent à des réalisations vidéos, parfois avec l’aide de collaborateurs extérieurs. Traités selon l’esthétique du clip (parfois avec de la musique composée sur mesure), ces vidéos viennent surimprimer une dimension nouvelle sur le réel, une incrustation dans un paysage quotidien.
Il en résulte un univers absurde, d’un morbide joyeux, toujours dans l’exploration du monstrueux, étonnant sans être provocant. L’idée étant d’emmener les participants et le public à faire un pas de côté vis-à-vis de leur territoire connu, et de nous aventurer ensemble sur des terrains que nous allons devoir inventer : un ailleurs.